LE CAUCASE 295 c'est qu'elle existe, mais que ses fondateurs, ses con- structeurs, ses défenseurs, autrefois célèbres, sont au- jourd'hui couchés sans nom dans des tombeaux sans épitaphe, ne s'inquiétant guère de ce que l'on dit et mème de ce que l'on rêve d'eux. Je ne troublerai donc ni leurs cendres ni votre repos en vous conduisant, à tra- vers l'aride antiquité, à la recherche d'une bouteille vide. Non; je vous invite seulement à vous promener avec moi un beau matin du mois de juin, afin de voir avec moi les vénérables restes de cette muraille du Caucase. » Ceignez votre sabre, jetez votre grand fusil tatar sur votre dos, poussez un hum! qui rivalise avec ceux de Joseph, en vous mettant en selle, levez votre fouet et en avant dans les montagnes! » Les portes de fer de Derbend, aujourd'hui des portes de tôle, s'ouvrirent pour nous au point du jour, et nous quittâmes la ville. Mes compagnons, dans ce voyage pit- toresque, sont, outre vous, mon cher colonel, le com- mandant de Derbend, major Kristnikof. Nous avions en- core avec nous un capitaine du régiment de Kourensky; là se bornait le nombre des Russes curieux. » Depuis le règne de Pierre le Grand, savez-vous com- bien de fois les Russes ont visité cette huitième mer- veille du monde que l'on appelle la muraille du Caucase? » Trois fois, et encore je n'aurais pas dû dire depuis Pierre le Grand, mais Pierre le Grand compris. » La première fois, c'était Pierre le Grand : 1722. » La seconde fois, c'était le colonel Verkovski, qui finit si tragiquement de la main d'Ammalat-Beg: 1819. » Et la troisième fois, nous : 1832. › Peut-être penserez-vous que le voyage est difficile,