LE CAUCASE 259 Coucherons-nous demain à Karabadakent? de- manda Moynet. - Vous coucherez demain à Karabadakent, dit le prince. -Allons, Moynet, allons! - Allons; mais je vous avertis que je déteste les pa- noramas. -- - - Vous aimerez celui-là, monsieur Moynet. - Eh bien, alors, prince, il n'y a pas de temps à perdre. Vous avez parlé de souper, nous avons faim. - En ce cas, ne perdons pas de temps. Cinq chevaux à ma tarentasse, et en route! Pendant qu'on mettait les chevaux à la voiture, je m'amusai à regarder les armes du prince. - Vous avez là un magnifique kandjar, prince. Ne dites jamais pareille chose à un Géorgien, car il fera à l'instant même ce que fit Bagration. Il le tira de sa ceinture. -Ah! pardieu! dit-il, je suis enchanté qu'il vous plaise; prenez-le; c'est de Mourtazale, le premier armu- rier du Caucase; il l'a fait exprès pour moi. Voyez, voici l'inscription tatare : Mourtazale a fait ce poignard pour le prince Bagration. - Mais, mon prince... - Prenez, prenez donc; il m'en refera un autre. Je regardai mon poignard. C'était, lui aussi, une fort belle arme du Daghestar; mais la poignée en ivoire vert damasquinée d'or n'était point d'uniforme pour le prince. D'ailleurs, poignard pour poignard, c'était ridicule. Je pensai à ma carabine à balle explosible. C'était une carabine que Devisme, notre grand artiste