250 IMPRESSIONS DE VOYAGE On ne voyait que des points noirs. Il y avait à peu près une lieue de plaine parfaitement unie, du chemin que nous suivions au pied de la mon- tagne. Avec l'autorisation de mes deux compagnons, je donnai l'ordre aux hiemchiks de diriger les voitures à travers cette plaine, droit sur le ravin de Zilly-Kaka. Notre escorte applaudit à cette décision par de grands cris. Les hommes qui la composaient avaient leurs frères et leurs amis engagés avec les Lesghiens et ils avaient hâte de savoir ce qu'ils étaient devenus. La tarentasse et la télègue abandonnèrent donc le chemin et se lancèrent à travers la plaine. Mais, par un effet de perspective tout simple, à me- sure que nous avancions, la première montagne gran- dissait, tandis que l'autre, la seconde au contraire, semblait s'abaisser derrière elle. Arrivés au pied de la première montagne, nous avions donc complétement perdu de vue ce qui se passait au sommet de la seconde. Ce qui m'étonnait, c'est que nous n'avions entendu aucun coup de feu, aperçu aucune fumée. - Nos Tatars nous expliquèrent cela. Montagnards et miliciens font feu les uns sur les autres quand ils se rencontrent, feu de leurs fusils, feu de leurs pistolets; puis ils tirent kandjars et schaskas, et tout se décide à l'arme blanche. On avait entendu le feu; on avait vu la fumée; main- tenant, c'était le tour des kandjars et des schaskas. Les deux voitures étaient arrêtées au pied de la mon- tagne; elles ne pouvaient pas aller plus loin. Nous proposâmes à nos Tatars de nous donner trois