LE CAUCASE 237 Je glissai une botte de paille sous la tête des trois ca- marades de lit; ce fut le traversin général. Puis je m'enveloppai dans ma pelisse et me jetai à mon tour sur le banc. Au bout d'une heure, mes trois compagnons de cham- brée ronflatent à qui mieux mieux. Ils étaient probable- ment à une hauteur où ne parvenaient pas les puces, si bonnes sauteuses qu'elles fussent, et dans une tempéra- ture qui donnait des congestions cérébrales aux pu- naises. Mais, moi qui étais resté dans les régions tempérées, je n'avais pu fermer l'œil. Je sentais littéralement re- muer le poil de ma pelisse sous l'invasion des in- sectes de toute espèce dont était peuplé notre do- micile. Je me jetai à bas de mon lit de camp; je rallumai la bougie et me mis à écrire d'une main, tandis que je me grattais de l'autre. La nuit passa sans que je pusse savoir l'heure ; ma montre était arrêtée et le coq était mort. Mais, si lon- gue qu'elle soit ou qu'elle paraisse, il faut toujours qu'une nuit finisse. Le jour parut ; j'appelai mes compagnons. Le premier qui se réveilla se cogna la tête au pla- fond, et servit de modérateur aux deux autres. Tous trois se retournèrent, se laissèrent glisser adroi- tement sur le ventre, et descendirent jusqu'à terre sans accident; seulement, ils avaient l'air de trois pierrots revenant de la Courtille, le matin du mercredi des cendres. On se procura toutes les brosses que l'on put trouver