LE CAUCASE 225 Aux abois des chiens, le maître sortit de sa maison. Nous étions dans notre tort, c'est vrai; mais nous y étions par erreur. Je me rappelai comment on disait, en russe, la station de poste, et je demandai : - · Postovaia stanzia ? Mon Tatar ne savait pas ou tenait à ne pas savoir le russe. Il répondit en grondant comme ses chiens; s'il eût su aboyer, il eût aboyé; s'il avait su mordre, il aurait mordu. Je ne compris pas plus sa réponse qu'il n'avait com- pris ma demande; mais je devinai, à son geste, qu'il nous indiquait le chemin à suivre pour sortir de chez lui. Je profitai de l'indication; mais, en me voyant leur tourner les talons, les chiens crurent que je fuyais, et s'élancèrent à ma poursuite. Je me retournai, j'armai mon fusil et je mis les chiens en joue. Nous recommençâmes d'opérer notre retraite par l'en- droit qu'avait indiqué le Tatar. Effectivement, le passage donnait sur la rue; mais les rues d'un aoul tatar for- ment un tel labyrinthe, qu'il faudrait le fil d'Ariane pour s'en tirer. Nous n'avions pas le fil, je n'étais pas Thésée et, au lieu d'avoir le Minotaure à combattre, nous avions toute une armée de chiens. J'avoue que le sort déplorable de Jésabel me revint à la mémoire. Moynet était resté quatre pas en arrière. - - Eh! sacrebleu! me dit-il, tirez donc, mon cher ! ti- rez donc je suis mordu. 13.