LE CAUCASE 209 salon, fut un tableau représentant un chef circassien défendant, avec ses hommes, la crête d'une montagne. Je demandai quel était ce chef pour qu'on lui fit les honneurs d'un tableau. C'était Hadji-Mourad. Ce même Hadji-Mourad, vous vous le rappelez, chers lecteurs, que nous avons vu figurer comme acteur, dans le grand drame de la mort de Gamsah-Beg. En effet, Hadji-Mourad est un des noms les plus popu- laires du Caucase; c'est un héros de légende plus les années s'écouleront, plus son spectre grandira. Après l'avénement de Schamyl à l'imamat, il se brouilla, ou fit semblant de se brouiller avec Schamyl pour entrer au service de la Russie; en 1835 et 1836, il était officier de milice. Le commandant de la forteresse de Kuntsack, le co- lonel Lazaref, crut alors s'apercevoir que Mourad avait des communications avec Schamyl. Il le fit arrêter et ordonna qu'il fût conduit sous bonne escorte à Tiflis. Arrivé au sommet d'une montagne où l'on faisait halte pour quelques instants, il s'approche à cheval des fais- ceaux de fusils, arrache un fusil aux faisceaux, une car- touchière à un soldat et s'élance dans le précipice. En tombant, il se casse les deux jambes. Les soldats reçoivent l'ordre de le poursuivre : quatre s'élancent à leur tour dans le ravin; lui, tout en ram- pant, fait feu quatre fois, tue les quatre soldats, et va rejoindre Schamyl. C'est avec son concours que Schamyl reprit Kuntsack et accomplit cette fameuse campagne de 1843, si fatale aux Russes. 12.