LE CAUCASE 449 part: chacun payait de sa personne : le général en chef d'un côté, l'imam de l'autre. Ce jour-là fut un jour de carnage comme n'en avaient jamais vu les ailes et les vautours qui planaient sur les cimes du Caucase. On nageait dans le sang; les échelons à l'aide desquels on escaladait la ville étaient formés chacun d'un cadavre. Plus de musique guerrière pour encourager les com- battants: elle était éteinte; le râle des mourants lui avait succédé. Un bataillon tout entier gravissait un sentier escarpé; un énorme rocher, roulé à force, de bras au sommet du sentier, sembla tout à coup se détacher de sa base de granit comme si la montagne, de son côté, se mettait à combattre pour les montagnards, descendit la pente, mugissant et terrible comme le toi nerre, et emporta un tiers du bataillon. eux qui restaient, accrochés aux saillies du roc, aux racines des arbres, levèrent alors la tête et virent le som- met de la montagne, d'où venait de se précipiter l'ava- lanche de granit, couronné de femmes échevelées et à demi-nues, brandissant des sabres et des pistolets. L'une d'elles, ne trouvant plus de pierres à faire rouler sur les Russes, et voyant qu'ils continuaient de monter, leur jeta son enfant après lui avoir brisé la tête contre le rocher; puis, avec une imprécation, se précipita elle- même, et tomba, respirant encore, au milieu d'eux. Les Russes montaient toujours; ils atteignirent le haut du rempart, et la nouvelle Akoulgo fut prise comme l'ancienne. Sur trois bataillons du régiment du général Paské-