LE CAUCASE 145 J'avais pris et écrit ces détails sur les lieux mêmes; j'avais gravi le petit monticule, le seul qui, à trente verstes à la ronde, domine la plaine; mes Cosaques, enfin, qui gardaient un religieux souvenir de cette bril- lante affaire, m'avaient montré l'emplacement de cet autre Mazagran, et, après avoir visité toute la ligne gauche, j'étais arrivé à Tiflis en coupant le cap de l'Ap-- chéron, passant par Bakou, Schoumaka et Tcherské-Ka- lotzy, lorsque, au détour d'une rue, le baron Finot, con- sul de France, auquel je donnais le bras, après avoir salué un officier qui nous croisait, me dit : - - Vous savez qui je viens de saluer? Non; je suis ici depuis avant-hier: comment vou- lez-vous que je connaisse quelqu'un ? -Oh! vous connaissez celui-là, j'en suis sûr, de nom au moins. C'est le fameux général Schouslof. Comment le héros de Schoukovaïa ? - Vous voyez bien que vous le connaissez. Je crois bien que je le connais! j'ai écrit toute son histoire avec les Tchetchens. Dites-moi! Quoi ? Pouvons-nous lui faire une visite? puis-je lui lire ce que j'ai écrit sur lui, et le prier de rectifier mon ré- cit, si je me suis écarté de la vérité? ― Parfaitement. Je vais lui écrire en rentrant, pour lui demander son heure et son jour. Le jour même, le baron avait sa réponse. Le géné-- ral Schouslof nous recevrait le lendemain, à midi. Le général est un homme de quarante-cinq ans, petit de taille, mais trapu, mais vigoureux, très-simple de manières, et qui s'étonna beaucoup de mon admiration I. 9