LE CAUCASE 125 tout en courant, elles font ainsi trois ou quatre verstes hors du village dans une fantasia échevelée. L'expédition terminée, elles vont au-devant des expé- ditionnaires et rentrent de la même manière dans la stanitza. Cette légèreté de mœurs des Tchervelonaises forme un étrange contraste avec la sévérité des mœurs russes et la rigidité des mœurs orientales; plusieurs d'entre elles ont inspiré à des officiers des passions qui ont fini par le mariage; d'autres ont fourni matière à des anec- dotes qui ne manquent pas d'une certaine originalité. Exemple : Une femme de Tchervelone donna une fois à son mari, qui l'adorait, de si grands sujets de jalousie, que celui-ci, n'ayant pas le courage d'assister au bonheur de rivaux si nombreux qu'il n'en savait plus le chiffre, déserta de désespoir et s'enfuit dans les montagnes, ой il prit du service contre les Russes. Fait prisonnier dans un engagement, il fut reconnu, jugé, condamné et fusillé. Nous avons été présenté à la veuve, qui nous a ra- conté elle-même sa lamentable histoire, avec des détails qui lui ôtaient quelque peu du dramatique dont elle eût pu l'entourer. - Ce qu'il y a d'affreux, nous disait-elle. c'est qu'il n'a pas eu honte de me nommer dans la procédure. Pour le reste, ajouta-t-elle, il s'est conduit en mala- dietz (1). J'ai été voir le supplice; le pauvre cher homme m'aimait tant, qu'il avait désiré que je fusse là, et que (1) Vaillant gaillard.