LE CAUCASE 111 -N'en faites rien ! vous nous priveriez d'un spectacle curieux. Nos Cosaques se consultent pour savoir qui ils lui enverront. Ils l'ont reconnu, c'est un abreck très- renommé. Tenez, voilà un de nos hommes qui se pré- sente. En effet, le Cosaque dont le cheval avait eu la cuisse cassée, après s'être assuré qu'il ne pouvait remettre sa bête sur ses jambes, venait réclamer son droit, comme on demandait, à la Chambre, la parole pour un fait per- sonnel. Les Cosaques se fournissent leurs chevaux et leurs armes de leurs deniers; sculement, quand un Cosaque a son cheval tué, son colonel, au nom du gouvernement, lui paye vingt-deux roubles. C'est huit ou dix roubles qu'il perd, un cheval pas- sable coûtant rarement moins de trente roubles. Vingt roubles que j'offrais à celui qui accepterait le combat donnaient donc à notre Cosaque démonté dix roubles de bénéfice net. Sa demande de combattre l'homme qui avait blessé son cheval me parut tellement juste, que je l'appuyai. Pendant ce temps, le montagnard continuait ses évo- lutions; il tournait en cercle, rétrécissant le cercle à chaque fois, de sorte qu'à chaque fois il se rapprochait de nous. Les yeux de nos Cosaques lancaient du feu : ils se regardaient comme défiés tous, et, cependant, pas un n'eût tiré un coup de fusil sur l'ennemi après le défi porté; celui qui eût fait une pareille chose eût été dés- honoré. -Eh bien, dit le chef de l'escorte à notre Cosaque, va!