LE CAUCASE 109 qu'elle n'avait que la cuisse cassée, je doublai sur elle et la tuai. Elle tomba. — Avez-vous vu où elle est tombée ? criai-je à Moy- net. J'ai tiré en plein soleil; je sais qu'elle est tombée, voilà tout. - Attendez, j'y vais, me dit Moynet. Il n'avait pas achevé, qu'à cent pas devant nous un coup de fusil partit, et, en même temps que je vis la fumée, j'entendis la balle qui passait à trois pas de moi, faisant son chemin tout en brisant les cimes des buis- sons où nous étions noyés jusqu'à la ceinture. Nous étrennions enfin ! Les Cosaques qui nous accompagnaient firent cinq ou six pas en avant pour nous couvrir. Un seul resta à sa place, ou plutôt accompagna dans sa chute son cheval qui se couchait. La balle que j'avais entendue siffler avait atteint la pauvre bête au haut du fémur et lui avait brisé une jambe de devant. Pendant ce temps, tout en regagnant le chemin, j'a- vais glissé deux balles dans mon fusil rechargé. Un Cosaque tenait mon cheval en bride: je remontai dessus et me dressai sur les étriers afin de voir plus loin. Ce qui m'étonnait, avec ce que je savais déjà des mœurs des Tchetchens, c'était la lenteur de l'agression: d'ha- bitude, une charge à fond suit le coup de feu. En ce moment, nous vîmes filer sept ou huit hommes du côté du Terek. - Hourra s'écrièrent nos Cosaques en s'élançant à leur poursuite. 7