78 IMPRESSIONS DE VOYAGE Nous commençâmes à nous en préoccuper comme les autres, et primes congé de nos charmantes hôtesses, qui voulurent nous mettre en voiture. En conséquence, elles nous accompagnèrent jusqu'au perron. Nous montâmes dans notre tarantasse. La maîtresse de police regardait avec inquiétude notre escorte de six Cosaques ne paraissait pas la rassurer. -Quelque chose vous préoccupe, madame ? lui de- mandai-je. Oui, me répondit-elle; est-ce que vous n'avez pas d'autres armes que vos kandjars? Je relevai une couverture jetée sur la banquette de devant et mis à jour trois fusils à deux coups, deux ca- rabines, dont une à balle explosible, et un revolver. - Oh! bien, dit-elle; seulement, sortez de la ville avec vos fusils à la main, afin que l'on voie que vous êtes armés ; parmi ces gens qui vous regardent (il s'é- tait, en effet, formé un cercle autour de nous), il y a peut-être deux ou trois espions des Tatars. Nous suivîmes le conseil qui nous était si fraternelle- ment donné; nous appuyâmes chacun la crosse d'un fusil à deux coups sur notre genou. Nous prîmes congé de ces dames et sortîmes de Kislar dans cette formi- dable attitude, au milieu du silence profond des quatre- vingts ou cent spectateurs qui nous regardaient partir. Une fois hors de la ville, nous replaçàmes nos fusils dans une position plus commode. La chose à laquelle on a le plus de peine à croire quand on est habitué à la vie de Paris, à la sécurité des