LE CAUCASE 61 des oies et des canards, et où les chameaux font provi- sion d'eau pour leur voyage. Presque dans toutes les rues, une chaussée de terre, elevée de trois ou quatre pieds au-dessus du niveau de la rue, fait un trottoir de trente ou quarante centimè- tres, pour les piétons. Ceux qui se rencontrent sur ce trottoir, s'ils sont amis, peuvent, en se faisant de mutuelles concessions et en s'accrochant l'un à l'autre, continuer leur chemin cha- cun de son côté. Mais, s'ils sont ennemis, c'est autre chose : il faut que l'un des deux se décide à passer dans la boue. Le soir, ces rues doivent être et sont, du reste, de charmants coupe-gorge, qui rappellent, non pas le Paris de Boileau, le Paris de Boileau est un lieu de sécu- rité auprès de Kislar, mais le Paris de Henri III. -- Nous arrivâmes chez le gouverneur, et nous nous fimes annoncer à lui; il vint au-devant de nous. Il ne savait pas un mot de français; mais, grâce à Kalino, l'obstacle était levé; d'ailleurs, il m'annonça, dans la première phrase qu'il me fit l'honneur de m'a- dresser, que sa femme, que nous allions trouver dans le troisième salon, parlait notre langue. J'ai remarqué que, sous ce rapport, en Russie et dans le Caucase, les femmes ont, en général, une grande supériorité sur leurs maris. Leurs maris ont presque toujours su le français peu ou prou dans leur jeunesse; mais les travaux militaires ou administratifs auxquels ils se sont livrés le leur ont fait oublier. Les femmes, auxquelles il reste un temps dont le plus souvent, en Russie surtout, elles ne savent que faire, 4