LE CAUCASE 59 le pan de ma redingote; j'appelle ainsi le vêtement que j'avais adopté, faute de lui trouver un nom convenable. - Je me retournai. C'était notre jeune hôte, qui, devenu plein de préve- nances, me faisait observer, en mauvais russe mêlé de tatar, que je sortais sans être armé. Kalino me 'raduisit l'observation. - En effet, je sortais sans être armé; il était quatre heures de l'après-midi, et il faisait grand jour : je croyais donc ne pas commettre d'imprudence. Je voulais continuer ma route sans tenir compte des avis du jeune Tatar; mais il insista avec tant d'obsti- nation, que, ne voyant aucun motif à ce petit bonhomme de se moquer de nous, je cédai à son insistance. Je rentrai, je mis à ma ceinture un poignard du Kho- rassan, long de quinze pouces, que j'avais acheté à As- trakan, et que je portais en voyage, mais que je croyais inutile de porter en ville. Kalino prit un grand sabre français, qui lui venait de son père, lequel l'avait ré- colté sur le champ de bataille de Montmirail, et, sans écouter, cette fois, les observations de notre jeune hôte, qui voulait que nous ajoutassions à cet accoutrement déjà passablement formidable, chacun un fusil à deux coups, nous quittâmes la maison, en faisant à Moynet signe qu'il y avait du danger, et en l'invitant à veiller, non-seulement sur les effets, mais encore sur lui- même.