50 IMPRESSIONS DE VOYAGE Il partit au galop, et disparut dans le chemin sinueux, qui, pareil à une rivière de boue, se perdait au milieu des haies. Ces haies enfermaient des jardins plantés de vigne et qui paraissaient parfaitement cultivés. Nous questionnâmes notre hiemchik, qui nous répon- dit que c'étaient des jardins arméniens. Ces jardins arméniens sont les vignobles où l'on ré- colte le fameux vin de Kislar. -- Le vin de Kislar, et celui de Kakétie, — moins bon, à mon avis, parce que, transporté dans des peaux de buf- fle, il prend le goût de la peau, — sont, avec le vin d'Odjalesch en Mingrélie et le vin d'Érivan, les seuls vins que l'on boive dans tout le Caucase, le pays où, proportion gardée, malgré sa population musulmane, on boit peut-être le plus de vin! On fait, en outre, à Kislar, une excellente eau-de-vie, connue par tout le Caucase sous le nom de kisliarxa. Ce sont les Arméniens qui font le vin et l'eau-de- vie. En général, dans le Caucase et dans les provinces qui en dépendent, ce sont les Arméniens qui font tout. Chaque peuple a sa spécialité. Le Persan vend des soieries, le Lesghien vend des draps, le Tatar vend des armes; l'Arménien n'a pas de spécialité, il vend de tout ce qui se vend, et même de tout ce qui ne se vend pas. En général, la réputation de l'Arménien n'est pas très-bonne. On vous dit à tout propos : Si le Tatar vous fait un signe de la tête, comptez sur lui.